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Chez Jeannette Fleurs

“Je m'intéresse à tout, je n'y peux rien.” Paul Valéry. Poussez la porte de la boutique : plus de 2.200 articles.

La gifle.

Si cette chanson vous rappelle
Le temps où vous étiez si belle
Où vous faisiez de vos jupons
Les voiles d'un bateau Fanfaron…
Julien Clerc
Jouez Violons, Sonnez Crécelles

On était au printemps 1989.

J'avais, depuis un an, intégré la rubrique Société de L'Express.

Dirigée par le baron Christian Ruffier d'Epenoux.

Mon bureau se trouvait au 2ème étage du 61 avenue Hoche.

L'étage noble…

Je menais une vie professionnelle difficile...

Puisque d'Epenoux m'avait collé d'office deux soirées de bouclage : le lundi et le mardi soir.

Même si j'étais cher payé...

C'était tout simplement épuisant.

A l'autre extrémité de l'étage se trouvait la sacro-sainte rubrique Monde.

Avec Jacques Renard comme rédacteur en chef.

Nombre de ces grands reporters avaient bossé avec Jean-Pierre Langellier au Figaro.

Et invoqué la clause de conscience pour partir, avec leurs indemnités, quand il y avait eu le rachat par Hersant.

Christian Hoche, Jacques Buob, Jacques Espérandieu, Yann de L'Ecotais...

En tant que "belle-soeur", je bénéficiais d'un statut à part.

En tant que femme...

J'étais sexy.

Très sexy.

Dans mes petites robes "Libération de Paris".

Et très courtisée.

Mon statut de veuve ajoutait encore à la touche romantique.

Et puis, toujours prête à décoller pour Los Angeles.

Où je préparais mon sixième séjour.

Avec, cette fois, des études à U.C.L.A. (University of California Los Angeles)

Le service Formation de L'Express paierait les cours.

A moi de payer le logement en cité universitaire.

Parmi les grands reporters de la rubrique Monde...

Il y avait Jean Leclerc du Sablon.

Un géant baraqué, délégué du personnel, spécialiste de la Chine.

Et Jean-François Leven.

Spécialiste Inde.

Les deux avait bossé à l'A.F.P. (Agence France Presse).

Au repas de midi, les journalistes s'égayaient dans les divers restaurants de L'Etoile à la Place des Ternes.

Repas payés sur les frais de fonction.

Ces messieurs avaient refusé l'idée d'une cantine au journal...

Car ils ne voulaient pas se voir "en plus" à l'heure du déjeuner.

Du coup, ils déjeunaient ensemble.

Rationnel, isn't it ?

15 heures...

C'est l'heure calme de la sieste.

Soudain...

Des Renard's boys débarquent pêle-mêle sur le palier devant mon bureau 

Je traduis difficilement leurs dires.

Jean Leclerc du Sablon, fin saoul, fait un scandale dans un restaurant, et, ils peinent à le ramener au journal.

Il ne fallait surtout pas qu'il passe devant le bureau de Yann de L'Ecotais.

Et qu'il emprunte la grande entrée.

Une fois arrivé face à mon bureau...

Qui était lui-même face à l'ascenseur de la petite entrée...

Le baron pourrait-il les aider à le coller sous la douche ???

Qui jouxtait les toilettes.

Leclerc du Sablon était un sage, et je ne l'avais jamais vu abuser de la dive bouteille.

Mais, là...

Sauf que...

Le baron était en reportage extérieur.

C'est donc à moi que fut refilé la tache.

Coller Jean sous la douche.

Avec l'aide de Leven…

Dans son délire, il pleurait, regrettant amèrement une gifle.

La douche fut rapidement faite.

Bien que cela ne soit guère facile de rentrer le format de Leclerc du Sablon dans ce placard exigu.

Jean cessa peu à peu de gesticuler et de hurler.

Et je devais apprendre les événements.

Grosse discussion avec Leven pendant le repas.

Et gifle devant tous.

Nous étions tous tétanisés d'apprendre cela.

Et puis...

Et puis arriva Jean-Pierre Dufreigne.

Qui décoinça l'atmosphère avec son irrésistible humour.

"Ma petite Lili, ce n'est pas la première fois qu'un noble gifle un juif !"

"Cela finit en général par un duel aux pistolets dans le bois de Boulogne."

"Les nobles ont toujours été attirés par les Juifs."

"Remember l'affaire Dreyfus."

Voilà.

Tout était dit.

Pendant ce temps on avait refilé un café bien chaud à Jean.

Et on est tous repartis vaquer à nos diverses occupations.

Mais, quand même….

Ce fut quelque chose : la gifle !

Liliane Langellier

P.S. La plupart des journalistes de "la bande à Yann" furent virés de L'Express par "la reine Christine" (Ockrent) en 1994.

La gifle.
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